Il était une fois dix-neuf voyageurs qui partaient en voyage…
C’est le début de l’histoire que Bach nous raconte.
Pour être précis, il y avait seize voyageurs et dans ce conte, quand les voyageurs sont perdus au plus profond de la forêt de nuit, ils se comportent tous selon leur type.
L’Aigremoine s’inquiète, la Mimule prend peur, l’Ajonc abandonne et pense à s’allonger et à attendre la mort.
Plus tard, après avoir retrouvé leur chemin, ils révèlent les forces positives de leur type: la Mimule ne connaît pas la peur, l’Ajonc parle du lever du soleil au petit matin. Ils continuent à guider d’autres voyageurs et montrent l’exemple à ceux qui n’ont pas encore entamé le voyage.
Bien que l’histoire ait été conçue dans l’esprit d’un conte, Bach n’en développa pas le symbolisme.
Il souhaitait simplement montrer les relations des remèdes-types entre eux au sein d’un groupe et illustrer leurs différentes manières de réagir à une expérience commune.
Cela constitue un outil de diagnostic des plus utiles. Il est facile de voir les différentes réactions émotionnelles quand on laisse chacun jouer son rôle dans une histoire. En termes pratiques, cela peut s’appliquer à presque tous les évènements quotidiens, que ce soit aller en ville se faire couper les cheveux, acheter une nouvelle paire de chaussures ou se plaindre de quelque chose ou ce qui se passe quand on décide de partir en vacances. La façon dont chacun de nous réagit à la situation montrera comment nous prenons des décisions, abordons une nouvelle expérience ou solutionnons nos difficultés. Les remèdes peuvent nous aider dans notre vie quotidienne.
Pour raconter l’histoire des voyageurs aujourd’hui, les dix-neuf fleurs pourraient être placées dans une nouvelle situation; ils ne marcheraient plus dans la forêt mais ils seraient toujours en voyage: ils sont dans un minibus et ils partent en groupe pour effectuer une visite.
La Verveine est l’organisateur et a bien travaillé pour informer chacun de l’organisation par e-mail mais voilà que la Clématite ne s’est pas réveillée. L‘Impatiente pense qu’ils ne devraient plus attendre ; dix heures c’est dix heures, dit-elle. Elle a menacé de partir en avant avec sa propre voiture; tendue et irritable, elle veut y aller.
Mais qui va conduire le bus ? C’est le Chêne. Et il laissera les autres se détendre et profiter du voyage. Se détendre ? Mais comment faire pour se détendre ? La Mimule s’inquiète à cause de la circulation sur l’autoroute et la vitesse à laquelle ils vont aller, elle a tellement peur. La Chicorée se sent mal, elle a mal à la tête et veut que tout le monde l’attende tandis que la Centaurée s’est renseignée pour aller à la pharmacie acheter d’autres cachets. L’Olivier est assis patiemment dans le bus, pâle et épuisé. La Gnavelle (Scleranthus) a pris place en premier à l’avant puis au fond puis de nouveau à l’avant. L’Hottonie des marais (Water Violet) regarde la scène avec amusement et dédain car elle a choisi le seul siège qui soit tout seul. Enfin la Clématite arrive et après une engueulade avec la Vigne, monte à bord, sort son baladeur, met ses écouteurs et écoute de la musique.
Où allons nous ? L’Avoine Sauvage veut savoir. « Qu’est-ce cela peut faire, dit l’Aigremoine, du moment qu’il y a un bistro.»😂
L’Eau de Roche regarde d’un air désapprobateur et se remet à lire Les douze principes de la Perfection. « Nous avons rendez-vous pour visiter un beau jardin » explique la Gentiane, « mais on n’y sera sûrement pas» ajoute-t-elle d’un ton morose.
Juste à ce moment il se produit un boum, de la fumée sort du moteur et le bus s’arrête en faisant crisser ses freins. La Gentiane secoue la tête. « C’est typique», se dit-il, «c’est bien ma veine.» Les yeux exorbités par la peur, l’Hélianthème (Rock Rose) commence à paniquer. Mais la Vigne est déjà debout et se met à crier à tous de rester calme. L’Ajonc affalé dans son siège semble ne pas se rendre compte de ce qui se passe. Que vont-ils faire maintenant, demande le Plumbago.
Très vite la Verveine a appelé le service de dépannage et rédigé dans sa tête la première d’une série de lettres virulentes à la société de location. Tandis que l’on répare le moteur, le groupe doit passer la nuit dans un hôtel proche et cet événement inattendu semble faire ressortir le pire chez tous; seul la Bruyère semble heureuse et passe son temps à raconter sa vie au réceptionniste. Le reste du groupe se dispute ou pleure. L’Hottonie des marais est montée dans sa chambre et les a laissés entre eux. On dirait que les choses ne pourraient pas être pires.
Le lendemain, la Gentiane veut abandonner et rentrer chez elle, il semble que cela ne vaille guère la peine de persévérer. L’Ajonc approuve.
Mais le petit Hélianthème qui prend son courage à deux mains dit qu’on doit vraiment essayer de poursuivre pour arriver jusqu’au jardin ; si tout le monde fait un gros effort pour être positif, alors ils pourront toujours y arriver. La Chicorée est sur le point de dire qu’elle a déjà fait un effort tout le long mais un regard de la Vigne la fait se taire. Mais, même s’ils veulent essayer, comment vont-ils trouver le jardin ? Le Plumbago veut savoir. Faudrait-il juste demander ? A ce moment-là, l’Hottonie des marais se met en avant, elle peut leur montrer le chemin puisqu’elle y est déjà allée.
Ils se remettent donc en route, essayant de s’encourager mutuellement tout le long du chemin. La Vigne travaille dur pour aider le groupe et prévoit de dire gentiment à la Centaurée qu’elle n’a pas de besoin de porter les bagages de tout le monde : mais la Centaurée est en grande conversation avec la Mimule et sourit tout doucement à la Vigne. L’Hélianthème a demandé avec confiance à la Verveine la carte routière et demande la route à l’Hottonie des marais tandis que la Verveine les écoute attentivement. La Gentiane est sûre qu’ils vont passer du bon temps maintenant.
La Chicorée a cessé de s’inquiéter pour elle-même et se préoccupe de l’Olivier. L’Ajonc se délecte à regarder la campagne à travers la fenêtre et fait des projets. Le Chêne a laissé la Gnavelle conduire et les pieds sur le siège, joue aux cartes avec l’Eau de Roche (qui a oublié de critiquer). L’Avoine Sauvage est en train d’écrire avec bonheur une histoire sur ce qui s’est passé. La Clématite a prêté sa musique à l’Impatiente qui se repose maintenant tandis que la Clématite regarde le paysage en profitant du moment présent. L’Aigremoine et la Bruyère sont assises en silence et se tiennent la main. Et le Plumbago vient s’asseoir près de l’Hottonie des marais. Ils discutent du changement d’humeur qui s’est produit.
La route qu’ils ont prise les mène enfin à un parking près d’une rivière. L’un après l’autre ils traversent le pont à proximité. L’Impatiente traverse la première, bien sûr, et se retrouve sur la berge de la rivière entourée de hautes balsamines en fleurs mauve pâle qui sont visitées par des centaines d’abeilles. Elle se laisse attirer par les fleurs. Tout en respirant profondément, elle commence à se relaxer pour la première fois depuis des mois.
Non loin de là, elle voit la Mimule entrer dans l’eau et se diriger vers des rochers, riant et chantant calmement toute seule alors qu’elle admire quelques jolies fleurs jaunes retombant sur l’eau. Et la Clématite aussi est tout près en train de regarder les arbres et de fixer d’un regard émerveillé de petites fleurs blanches qui brillent comme des étoiles sur le vert foncé des feuilles. Comme les autres traversent le pont, ils s’arrêtent pour parler avec l’Impatiente, la Mimule et la Clématite et regardent leurs fleurs. Comme elles leur ressemblent ! Puis ils partent se promener chacun dans une direction en regardant s’ils trouvent aussi un endroit spécial dans le jardin. Et bien sûr, chacun d’eux cherche sa fleur et la trouve poussant joyeusement dans des conditions parfaites.
L’Hélianthème et la Gentiane doivent marcher un peu plus loin parce qu’elles doivent grimper sur une colline de l’autre côté de la rivière. L’Avoine sauvage parcourt tout le jardin et découvre sa propre plante sur les bords du chemin. Il y a des oliviers et des vignes, des buissons d’ajonc et des chênes. La pauvre Bruyère doit faire une longue marche solitaire jusqu’en haut de la colline la plus élevée mais cela ne le dérange pas du tout. L’Hottonie des marais trouve un beau bassin d’eau stagnante non loin d’une source qui éclabousse les rochers de son eau froide et claire. Il existe un endroit parfait pour chacun.
Plus tard dans la journée, ils reviennent par petits groupes de deux ou trois vers le pont. Là ils rencontrent quelqu’un qui semble être le jardinier. Comme ils parlent et lui posent des questions, il leur dit beaucoup de choses sur eux-mêmes et leur plante personnelle. Le Plumbago veut savoir pourquoi ses fleurs sont bleues ; la Mimule lui demande pourquoi la sienne vit si près de l’eau. Le Chêne pose des questions sur les racines, les feuilles et les fleurs et ce qu’elles symbolisent. Chaque partie de la plante, leur dit le jardinier, a une signification et représente une qualité d’être. L’endroit où pousse une plante et son mode de croissance exposent des aspects de ces qualités. De même que les personnes Clématite et Impatiente ont des comportements différents, il en va de même des plantes. Cependant certaines plantes ou arbres ont des qualités communes, elles ont des racines profondes ou des feuilles velues ou un port particulièrement droit et ces caractéristiques sont aussi communes à la personne et à la plante. Dans le jardin, il y a beaucoup d’êtres différents, chacun ayant sa propre individualité ou âme. C’est la qualité d’âme qui donne sa forme à la plante.
Pendant qu’ils parlent, l’Avoine Sauvage regarde autour d’elle. En indiquant une autre partie du jardin, au-delà du lieu où poussent les oliviers, elle demande en hésitant qui pourraient être ces autres personnes ? Là où elle fait signe, la terre est perturbée et à certains endroits, elle a été labourée ; il y a des champs, des haies et de grosses pierres regroupées au centre d’un champ. Beaucoup d’arbres là-bas sont tout en fleurs et ils affichent pleinement leur force et leur détermination. Ce sont, dit le jardinier, des gens qui ont souffert dans la vie, ils apprennent à transformer leur expérience. Le groupe d’amis est étonné et veut aller leur dire bonjour. Quand ils y arrivent, ils aperçoivent le Tremble, l’Orme, le Marronnier Rouge, le Saule et l’Avoine Sauvage et tous les autres qui sont aussi dix-neuf.
Il y a tant de personnes qui parlent ensemble qu’il est naturel que des groupes commencent à se former. Le Marronnier Rouge commence à leur dire à quel point il était inquiet quand la Mimule était perchée sur les pierres au milieu de la rivière. Le Prunus (Cherry Plum) imaginant qu’il aurait été effrayé commence à inspirer profondément pour se calmer. Le Tremble se tient à côté d’eux, tremblant comme une feuille. L’Avoine Sauvage, la Gnavelle et le Plumbago se mettent bientôt à parler avec la Gentiane et l’Ajonc. Ils se sont déjà rencontrés, bien sûr, mais c’est maintenant au tour du Charme de les rejoindre. La Bruyère, l’Impatiente et l’Hottonie des Marais forment un petit groupe à part. Comme ils parlent et apprennent des choses sur la vie de chacun, ils s’aperçoivent qu’ils peuvent s’entre aider et travailler ensemble pour aider tout le monde. On ne sait pas comment l’histoire se termine car ils se parlent encore. »
Extrait de « Sur les traces du Dr Bach et de ses fleurs« , Julian Barnard, l’histoire des voyageurs page 327